Procédure pour les biens en état d’abandon manifeste
Face aux biens en état d’abandon, les communes disposent de la procédure de déclaration de parcelle en état d’abandon. À la différence des immeubles menaçant ruine, cette procédure ne peut être utilisée que lorsque aucune menace imminente ou à moyen terme n’est prévisible.
Le principe Le régime des biens en état d’abandon manifeste est une procédure permettant à la commune de déclarer en état d’abandon manifeste des immeubles, parties d’immeubles, et terrains à l’abandon, situés à l’intérieur du périmètre d’agglomération de la commune, dans le but d’amener leur propriétaire à faire cesser cet état. Depuis le 1er janvier 2006, une telle procédure peut également être mise en œuvre pour les voies privées assorties d’une servitude de passage public. La commune ne pourra prendre possession du bien qu’après expropriation : à défaut de réaction de la part des propriétaires, lesdits biens pourront être expropriés, soit afin de construire des logements, soit dans le but de réaliser tout objet d’intérêt collectif relevant d’une opération de restauration, de rénovation ou d’aménagement. Le régime juridique est prévu par les articles L2243-1 à L2243-4 du CGCT. Cette procédure constitue, pour partie, une alternative à la législation sur les biens vacants et sans maître et à la procédure classique d’expropriation pour cause d’utilité publique. Elle a été créée pour aider les communes dans leurs efforts de rénovation et de réhabilitation du patrimoine local. Elle permet de traiter, dans le périmètre des agglomérations, les immeubles bâtis ou non bâtis à l’abandon ou en ruine, et de favoriser leur réaménagement. La procédure des biens en état d’abandon garde son intérêt lorsque le propriétaire est connu, mais défaillant, car elle permet de l’obliger à faire des travaux ou à vendre, sans acquisition nécessaire du bien par la commune.
La procédure est engagée par le maire, et elle se déroule selon le schéma suivant :
- repérage des parcelles bâties ou non bâties dépourvues d’occupants à titre habituel et manifestement non entretenues ;
- le maire détermine la ou les parcelles concernées et recherche (dans le fichier immobilier ou au livre foncier) pour chacune de ces parcelles les propriétaires, les titulaires de droits réels et autres intéressés ;
- pour chaque parcelle concernée, le maire constate ensuite par un procès-verbal provisoire l’état d’abandon manifeste. Ce procès-verbal indique la nature des désordres affectant le bien auxquels il convient de remédier pour faire cesser l’état d’abandon manifeste.
Ce procès-verbal doit :
- être affiché pendant trois mois à la mairie et sur les lieux de situation concernés ;
- être notifié aux propriétaires, titulaires de droits réels et autres intéressés (à peine de nullité, la notification doit reproduire intégralement les termes des articles L2243-1 à L2243-4 du CGCT, et lorsqu’une de ces personnes n’a pu être identifiée, ou si son domicile n’est pas connu, la notification la concernant est faite à la mairie du lieu de situation du bien) ;
- faire l’objet d’une insertion dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le département. À compter de l’exécution de l’ensemble des mesures de publicité susvisées, les propriétaires disposent alors d’un délai de trois mois pour se manifester.
Trois cas sont envisageables :
- Le propriétaire ne se manifeste pas dans le délai de trois mois : le maire poursuit la procédure ;
- le propriétaire réalise les travaux mettant fin à l’état d’abandon manifeste dans le délai de trois mois : la procédure ne peut pas être poursuivie ;
- le propriétaire fait part de son intention, dans le délai de trois mois, de mettre fin à l’état d’abandon manifeste en commençant les travaux nécessaires ou en s’engageant à réaliser ces travaux dans un délai fixé en accord avec le maire, la procédure ne peut pas être poursuivie.
Toutefois, elle peut être reprise si les travaux n’ont pas été réalisés dans le délai prévu. Au terme du délai de trois mois ou, à défaut de réalisation des travaux, au terme du délai fixé pour les réaliser (si cette date est postérieure), le maire constate l’état d’abandon manifeste de la parcelle par un procès-verbal définitif. Ce procès-verbal est tenu à la disposition du public. Le maire saisit à nouveau le conseil municipal qui décide, s’il y a lieu, de déclarer la parcelle en état d’abandon manifeste et d’en poursuivre l’expropriation au profit de la commune pour une destination déterminée.
L’expropriation est poursuivie au profit de la commune, dans les conditions prévues à l’article L.2243-4 du CGCT. Elle doit avoir pour but, soit la construction de logements, soit tout objet d’intérêt collectif relevant d’une opération de restauration, de rénovation ou d’aménagement. Le maire constitue un dossier présentant le projet simplifié d’acquisition publique, ainsi que l’évaluation sommaire de son coût, qui est mis à la disposition du public, pendant une durée minimale d’un mois, appelé à formuler ses observations dans des conditions précisées par la délibération du conseil municipal. Sur demande du maire ou si celui-ci n’engage pas la procédure mentionnée au deuxième alinéa dans un délai de six mois à compter de la déclaration d’état d’abandon manifeste, le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou du conseil départemental du lieu de situation du bien peut constituer un dossier présentant le projet simplifié d’acquisition publique, ainsi que l’évaluation sommaire de son coût, qui est mis à la disposition du public, pendant une durée minimale d’un mois, appelé à formuler ses observations dans des conditions précisées par la délibération de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale ou du département. La procédure se déroule selon les voies habituelles : saisine du préfet pour déclaration d’utilité publique après enquête publique, signature de l’arrêté de cessibilité après enquête parcellaire, puis saisine du juge de l’expropriation, afin de prononcer le transfert de propriété par ordonnance et de fixer le montant des indemnités. Si le propriétaire est inconnu, la procédure d’expropriation se poursuit normalement et le juge va, selon le droit commun, rendre l’ordonnance de transfert. L’article R 221-8 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique précise que « l’ordonnance ne peut être exécutée à l’encontre de chacun des intéressés que si elle lui a été préalablement notifiée par l’expropriant ». Cette exigence étant irréalisable à l’égard d’un inconnu, la publicité peut être effectuée par affichage de l’ordonnance à la mairie du lieu des travaux. La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains du 13 décembre 2000, dans son article 194, a complété l’article L411-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique en prévoyant explicitement la possibilité pour les communes de céder les biens en état d’abandon ainsi expropriés à des personnes de droit privé ou de droit public, à la condition qu’elles les utilisent aux fins prescrites par le cahier des charges annexé à l’acte de cession. Cette procédure est utile aux communes dépourvues de moyens pour lutter contre la multiplication des ruines et des biens en état d’abandon, notamment dans le centre des agglomérations. Son principal intérêt est d’inciter fortement les propriétaires défaillants, sous menace d’expropriation, à mettre fin à l’état d’abandon. Textes en vigueur Articles L2243-1, L2243-2, L2243-3 et L2243-4 du code général des collectivités territoriales Article L411-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.